Des gens meurent, et nous ne faisons rien !

Publié le par Chaffards

(article écrit début Mars, mais sans doute encore d'actualité)

 

Aaaah ! Une No Flight Zone ! Un bras vengeur, un punisher, un ange exterminateur, agir enfin ! Tuer des méchants, sauver des gentils. Agir, agir, agir...
Des centaines de millions de frustrés devant leur écran. Tous ces malheurs, toutes ces images de gens qui n'ont pas l'essentiel alors que nous avons cent fois le superflu. Pouvoir enfin y aller, l'action pure, le logiciel qui ne bug pas et n'extermine que les morts-vivants et aucun passant, aucun badaut, aucun curieux...
On sait que ça a capoté en Irak, en Afghanistan... mais quand même, là on pourrait...enfin il faut...enfin on peut pas laisser...une telle souffrance...une telle occasion de donner du bonheur, de la liberté, du comme-nous...
J'aime bien cette petite tension autour de la Libye parce qu'elle me semble cumuler quelques noeuds psychologiques de l'époque :
- La frustration de la non-action face à tant de misère mondiale reçue dans le salon tous les soirs
- la perte de croyance en beaucoup de choses qui cherche à se compenser, à s'évacuer. Elle prend cette forme d'une envie d'action pure, d'un comportement sublime au nom de la transcendance de nos valeurs. Une sorte de pragmatisme abstrait.
- La gestion de la culpabilité issue de la deuxième guerre mondiale (pacifisme puis défaite sidérante puis collaboration puis mutisme post-guerre)
- la maladie infectieuse qui prend le pas sur la politique : les droits de l'homme universels donc cautionnant et justifiant le droit d'ingérence.
- La paresse pour régler les problèmes intérieurs, longs et compliqués, d'intégration, de racisme, de votes extrêmistes, de chômage, de délinquance et donc la passion pour une action médiatiquement (à défaut de physiquement) pure pro-arabe
- Une occasion de produire un rapport de domination sur les gouvernements qui émergeraient d'une guerre dans laquelle nous avons été impliqué (et éviter ce que certains baptisent aujourd'hui le deuxième mouvement de décolonisation)
- Effacer le souvenir de la proximité avec les interlocuteurs d'hier, méchants d'aujourd'hui


Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article