Essence Vs puissance

Publié le par Chaffards

Entendu ce matin sur France Culture : "Avec la shoah, horreur sans précédent de l'histoire de l'humanité, nous avons appris ce dont l'homme était capable. Nous avons appris que la Shoah faisait aussi partie de son essence." (cité de mémoire)

Bien entendu, nous nous inscrivons en faux contre cette remarque puisque nous rejetons l'idée d'essence de l'homme.

Mais pourquoi ?

Quel est l'enjeu derrière le principe d'un homme doué d'une essence (Toujours la même depuis 3 (ou 4?) millions d'années et qu'il faudrait approcher, cerner, "désenfouir") ou d'un homme en perpétuelle construction (Ce que l'homme sera demain n'est pas contenu dans ce qu'il est aujourd'hui, le nouveau existe) ?

"Constructivisme", "nouveauté", "changement", "émergence" : Qu'est-ce que ces termes impliquent ?

 

Prenons le problème dans le sens inverse pour faire comprendre la dualité des positions.

Admettons qu'il y ait une essence de l'homme.

Un truc au fond de lui, absolument invariable tant que l'homme est homme. insensible au temps, aux événements, aux situations.

A force d'histoires, de recherches, d'évolutions, cette brique originelle sera peu à peu mise à jour. Un domaine sera circonscrit, les "possibilités d'être" feront l'objet d'une liste de plus en plus proche de l'exaustivité. Ainsi irait la vie humaine. La création serait alors une opération consistant à s'approcher le mieux possible de cette essence. Nous pensons par exemple au complexe d'Oedipe et la façon dont Freud interprétait les artistes à travers cette seule grille. Nous pensons aussi à Girard et au mimétisme.

Dans le camp adverse, l'idée développée est qu'il y a des sauts, des ruptures, des ingérences-émergences de choses qui n'étaient pas là avant. Et c'est même ces opérations qui rendent "vivante la vie", dynamique, puissante. Il n'y a rien à cerner, délimiter, lister, il y a au contraire à s'extraire, prendre des lignes de fuite et produire des nouveaux sons, des nouvelles façons de parler, de s'aimer, de vivre ensemble, de vivre seul,... Si brique il y a, ce sont celles qui sortent des usines, et composent un nouveau monde et donc une nouvelle usine avec de nouvelles sortes de briques, etc.

Ceci implique, entre autre, qu'il faut avoir une attitude très prudente et ouverte face aux choses nouvelles qui surviennent et rester très modeste sur le monde tel que nous le connaissons. Il ne doit pas servir de référence absolue. Il n'est qu'une possibilité de monde, et non une essence de monde.

 

Définir ce qui est réellement nouveau a fait l'objet de plusieurs messages et nous y reviendront sans doute encore, mais le principe de composition d'un futur, d'un l'homme futur (même "homme" devrait être oublié. Il faudrait dire : "ceux du futur"), de la société future, du monde futur et le fait que c'est dans l'opération de renouvellement et de construction que réside le secret de la vie, et bien ce principe ne peut s'accomoder d'un concept "d'essence de l'homme".

SI nous pouvons vivre, avancer, produire, c'est justement parce qu'aucune chaîne essentielle ne nous freine,

Ceci pour le meilleur, et pour le pire.

 

 

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